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Référence de la petite annonce : 3183
Je propose dans la catégorie : spiritualité
Pièce jointe: Revolte des moines birmans et vegetarisme.pdf
annonce déposée le : 22-11-2007
Par : avi
Un texte engagé de Thich Nhat Hanh sur la révolte des moines birmans

image de l'annonce 3183

Un texte poignant d'humanité et de conscience, dont je retiens une phrase puissante de Thich Nhat Hanh : «Croire qu’il s’agit simplement de s’asseoir pour goûter le calme et la paix, c’est faux.»

Extrait de la revue Ici & Maintenant


Bonne lecture

Pièce jointe au format pdf pour impression

Avi


DOCUMENT INÉDIT : Un texte engagé de Thich Nhat Hanh

sur la révolte des moines en Birmanie et le réchauffement climatique

12 octobre 2007 - traduit par Marie-Anne Tattevin


Chère famille spirituelle, Blue Cliff est un très bel endroit en automne. Les forêts sont ornées de feuilles mûrissantes. Aujourd’hui à 11 heures, des retraitants vont arriver de partout pour participer à une retraite intitulée “S’asseoir dans la Brise d’automne”. Un grand nombre de personnes se sont inscrites, mais nous n’avons pas assez de place ici, et nous avons dû refuser beaucoup d’inscriptions. Nos frères et soeurs monastiques et laïcs le regrettent vivement, mais nous ne pouvons pas faire autrement. C’est la première grande retraite à Blue Cliff. Tout le monde veut venir pratiquer avec la Sangha, et en même temps «découvrir» ce nouveau monastère.


Le 9 octobre 2007, dans l’après-midi, des journalistes du Time Magazine sont venus interviewer Thây sur les événements qui se sont déroulés en Birmanie, et sur le réchauffement climatique. Cette interview sera diffusée sur internet. Thây a dit que les moines birmans ont été courageux de se révolter pour montrer au peuple le chemin des droits de l’homme et de la démocratie. Ils se sont comportés comme de véritables chefs spirituels du pays. Un pays, une nation ne peuvent exister sans dimension spirituelle. Une vie humaine doit aussi avoir une dimension spirituelle. Sans dimension spirituelle, nous n’aurons pas la capacité d’affronter la souffrance, de transformer la souffrance et d’offrir quelque chose à la vie. Une personne sans chemin spirituel est quelqu’un qui marche dans le noir. Avec un chemin, nous n’avons plus à avoir peur ou à nous faire du souci. Les moines birmans ont montré le chemin à leur pays, à leur nation.


Même s’ils doivent affronter l’oppression, l’emprisonnement, et même la mort, leur esprit est en paix, parce qu’ils ont pu faire ce qu’ils avaient fait le voeu d’accomplir : offrir à leur pays, à leur nation une guidance spirituelle. Ils ont assumé leur responsabilité. Chaque fois que les gens en Birmanie, quelle que soit leur classe sociale, pensent à ces moines, ils seront touchés : cette énergie d’amour et de foi qui sera leur force, leur motivation, permettra de nourrir des actions en faveur des droits de l’homme et de la démocratie dans le pays. Le monde soutient la Birmanie, tout comme le monde a soutenu la lutte pour les droits de l’homme et la liberté des Bouddhistes et du peuple vietnamien dans les années 1960, sous le régime de Ngo Dinh Diem. Ce n’était pas un seul pratiquant bouddhiste qui s’était soulevé, mais tous les pratiquants bouddhistes en même temps. La même chose se produit en Birmanie. Ce n’est pas un seul moine, mais tous les moines qui se sont révoltés.

C’est cela, la vraie guidance spirituelle.


Thây a également dit aux journalistes du Time Magazine : dans le monde entier, nous attendons que les chefs spirituels des Etats-Unis se lèvent pour offrir cette guidance spirituelle, afin de mettre fin rapidement à la souffrance et à la destruction de la vie en Irak. Les chefs spirituels doivent se lever ensemble et s’exprimer clairement pour aider les gens à se réveiller, pour leur montrer le chemin. Lorsque le peuple a une vision claire de la situation, lorsqu’il a une opinion déterminée, le gouvernement n’a pas d’autre choix que de le suivre. La guerre du Vietnam a pris fin grâce au réveil du peuple américain, à l’époque.


Le 6 octobre 2007, lors d’une journée de Pleine Conscience organisée pour 1800 psychothérapeutes à l’Université de Californie, à Los Angeles, les moines et les moniales de Deer Park et du Village des Pruniers ont mis leur robe Sanghati après l’enseignement, puis ils ont chanté May the Day Be Well et évoqué le nom du Bodhisattva Avalokiteshvara pour envoyer de l’énergie aux moines et aux pratiquants laïcs de Birmanie. Le gouverneur de la Californie et son épouse ont participé à toute la journée de Pleine Conscience. Avant d’offrir leur chant, les moines et les moniales ont déclaré que les communautés du Village des Pruniers et de Deer Park veulent exprimer leur solidarité avec les moines et pratiquants laïcs de Birmanie. Ensuite, une motion en deux points a été lue à haute voix à l’assemblée. Le premier point est que nous proposons que les Nations Unies envoient immédiatement en Birmanie une commission d’enquête composée de membres de différents pays, tout comme l’ONU l’avait fait au Vietnam en septembre 1963. Le second point est que nous demandons au Comité Olympique International de coopérer avec la Chine, afin que la Chine exerce une pression sur la junte au pouvoir en Birmanie pour instaurer la démocratie dans ce pays. Tous les participants à cette conférence de 3 jours pour les psychothérapeutes de l’UCLA se sont levés à ce moment pour exprimer leur soutien à cette motion, même le gouverneur de la Californie. De nombreux journalistes étaient présents. La salle de conférence était parfaitement silencieuse, générant une énergie collective puissante.


En ce qui concerne le réchauffement climatique, Thây a raconté aux journalistes du Time Magazine l’histoire du couple qui a mangé la chair de son fils – une histoire racontée par le Bouddha dans le Soutra sur la chair du Fils. Ce couple, avec un jeune enfant, devait traverser un désert pour atteindre une terre d’asile. Comme ils connaissaient mal la région, ils se sont trouvés à court de nourriture, alors qu’il restait encore la moitié du désert à traverser. Ils ont pris conscience qu’ils allaient mourir tous les trois dans le désert, sans espoir d’atteindre le pays de l’autre côté pour prendre refuge. Alors, ils ont décidé de tuer leur fils. Chaque jour, ils mangeaient un petit bout de sa chair, pour avoir assez de force pour avancer, et ils portaient le reste de la chair de leur fils sur leurs épaules, pour qu’il sèche au soleil. Chaque fois qu’ils avaient mangé un bout de la chair de leur fils, ils se regardaient et se demandaient : « Où est notre cher enfant maintenant ? » Après avoir raconté cette histoire tragique, le Bouddha a regardé les moines et a demandé : «Pensez-vous que ces parents étaient heureux de manger la chair de leur fils ?» «Non, Honoré de par le Monde. Le couple souffrait chaque fois qu’il devait manger la chair de son fils, » répondirent les moines. Le Bouddha a expliqué : « Chers amis, nous devons pratiquer et manger de telle sorte que nous ayons toujours de la compassion dans notre coeur. Nous devons manger en conscience. Sinon, peut-être mangerons-nous la chair de notre propre enfant. »


L’UNESCO nous informe que 40 000 enfants meurent chaque jour de faim ou de dénutrition. Pendant ce temps, du maïs et du blé sont utilisés pour nourrir le bétail (vaches, porcs, poulets, etc.) ou pour produire de l’alcool. Environ 80 % du maïs et 95 % de l’avoine produits aux Etats-Unis sont destinés à l’alimentation animale.


Le bétail élevé dans le monde consomme une quantité de nourriture suffisante pour couvrir les besoins caloriques de 8,7 milliards de personnes, soit plus que la population mondiale actuelle.

Manger de la viande et boire de l’alcool en Pleine Conscience nous permettra de comprendre que nous mangeons la chair de nos propres enfants.


En 2005, la FAO, Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture a commencé une étude approfondie sur les différents impacts de l’élevage sur l’environnement à l’échelon de la planète. Ce rapport, intitulé «L’ombre à long terme des animaux d’élevage : questions et options environnementales», a été publié le 29 novembre 2006. Henning Steinfeld, chef du Secteur Information et politique d’élevage du FAO, coordinateur de ce rapport, explique dans son résumé : «Le secteur de l’élevage apparaît comme l’un des deux ou trois plus grands facteurs contribuant aux problèmes environnementaux les plus graves, à toutes les échelles, du niveau local au niveau mondial. Les conclusions de ce rapport suggèrent que cela pourrait être une piste majeure pour traiter les problèmes de dégradation des terres, de changement climatique, de pollution de l’air, de pénurie d’eau, de pollution de l’eau et de la perte de biodiversité. La contribution de l’élevage aux problèmes environnementaux se situe à une échelle massive, et sa contribution potentielle à leur solution est également très grande. L’impact est tellement significatif qu’il doit être considéré de manière urgente » (page XX).


Dégradation de la terre : Aujourd’hui, l’élevage couvre 70% des terres agricoles et 30% de la surface terrestre de la planète. Des forêts sont abattues pour créer de nouveaux pâturages, et c’est un des principaux facteurs de la déforestation. Par exemple, en Amérique latine, environ 70% des anciennes forêts d’Amazonie ont été transformées en pâturages (page XXI)1. Ces chiffres montrent que l’élevage a détruit des millions d’hectares d e forêts dans le monde entier pour produire des aliments et des pâturages pour les animaux. De plus, lorsque les forêts sont détruites, d’énormes quantités de dioxyde de carbone stockées dans les arbres sont rejetées dans l’atmosphère.


Changement climatique : L’élevage a des répercussions importantes sur l’atmosphère et le climat. Il est responsable de «18 % des émissions de gaz à effet de serre mesurées en équivalent de dioxyde de carbone, une part supérieure à celle du transport». Cela veut dire qu’élever des animaux à des fins alimentaires produit plus de gaz à effet de serre que toutes les voitures et les camions dans le monde entier. L’élevage est responsable de 9 % des émissions de dioxyde de carbone anthropogènes. Il émet en outre 37 % du méthane anthropogène, principalement du fait de la fermentation entérique des ruminants. C’est une quantité énorme, parce que chaque kilo de méthane est vingt-trois fois plus efficace que le dioxyde de carbone pour piéger la chaleur dans notre atmosphère (23 fois le potentiel de réchauffement climatique (PRC) du dioxyde de carbone). Les industries de la viande, des oeufs et du lait sont également responsables de l’émission de 65% de l’oxyde nitreux anthropogène, essentiellement sous forme de fumier. L’oxyde nitreux est environ 300 fois plus puissant comme gaz à effet de serre que le dioxyde de carbone (296 fois le PRC du dioxyde de carbone). Cette industrie est également responsable d’environ deux tiers (64 %) des émissions anthropogènes d’ammoniac, qui contribuent largement aux pluies acides et à l’acidification de l’écosystème (page XXI)1.


Pénurie et pollution de l’eau : Plus de la moitié de l’eau consommée aux Etats-Unis est utilisée pour l’élevage. Il faut en moyenne 20 000 litres d’eau pour produire un kilo de viande, tandis que 200 litres d’eau suffisent pour produire un kilo de céréales. L’élevage aux Etats- Unis produit une quantité énorme d’excréments, 130 fois plus que les excréments humains ; chaque seconde, les animaux produisent 50 tonnes de déchets. «La majeure partie de l’eau utilisée pour l’élevage retourne à l’environnement sous forme de lisier et d’eaux usées. Les excréments des animaux d’élevage contiennent une quantité considérable d’éléments nutritifs (azote, phosphore, potassium), des résidus de médicaments, des métaux lourds et des agents pathogènes» (page 136)1. Ces déchets sont déversés dans les cours d’eau, polluent les sources et provoquent des épidémies qui affectent toutes les espèces.


Malgré les avertissements du Bouddha, nous sommes en train de manger la chair de nos enfants et petits-enfants. Nous mangeons la chair de nos mères et de nos pères. Nous mangeons notre propre planète, la terre. Le soutra sur la Chair du Fils devrait être enseigné à tout le genre humain pour nourrir sa pratique.


La recommandation de l’ONU est claire : «L’impact environnemental par unité de production animale doit être réduit de moitié, juste pour éviter d’accroître le niveau des dégâts au-delà du niveau actuel», (page XX)1. Il faut réduire d’au moins 50 % la production industrielle de viande, et pour cela, il faut réduire de 50 % notre consommation de viande. L’ONU rapporte également que même si l’élevage est réduit de 50 %, nous devrons néanmoins appliquer de nouvelles technologies pour que l’élevage restant soit moins polluant, en sélectionnant l’alimentation des animaux de façon à réduire la fermentation entérique et les émissions de méthane, etc. Il est urgent d’agir à l’échelon individuel et collectif. En tant que famille spirituelle et famille humaine, nous pouvons contribuer à éviter le réchauffement climatique en pratiquant la Pleine Conscience lorsque nous mangeons. Devenir végétarien est peut-être la meilleure façon de combattre le réchauffement climatique.


Les pratiquants bouddhistes pratiquent le végétarisme depuis plus de 2000 ans. Nous sommes végétariens dans l’intention de nourrir notre compassion envers le monde animal. Maintenant, nous savons également que nous sommes végétariens pour protéger la terre, éviter que l’effet de serre lui cause des dégradations graves et irréversibles. Dans un avenir proche, lorsque l’effet de serre va devenir plus prononcé, toutes les espèces vont souffrir. Des millions de gens vont mourir et le niveau des mers va s’élever, inondant des villes et des pays. De nombreuses épidémies mortelles vont en résulter, et toutes les espèces vont souffrir des conséquences de ce phénomène.


Les monastiques et les laïcs pratiquent tous le végétarisme. Si le nombre de laïcs qui sont végétariens à 100 % n’est pas aussi élevé que parmi les pratiquants monastiques, leur pratique consiste à consommer des menus végétariens 4 jours ou 10 jours par mois. Thây pense que cela n’est pas très difficile d’arrêter de manger de la viande, si nous savons que nous faisons cela pour sauver la planète. Les communautés laïques devraient avoir le courage de s’engager à être végétariennes, au moins 15 jours par mois. Si nous arrivons à faire cela, nous ressentirons un bien-être. Nous connaîtrons la paix, la joie et le bonheur dès que nous pourrons faire ce voeu et prendre cet engagement. Pendant les retraites organisées aux Etats-Unis cette année, de nombreux pratiquants bouddhistes américains ont pris l’engagement de cesser de manger de la viande ou de manger deux fois moins de viande. C’est le résultat d’une prise de conscience, après avoir écouté les enseignements du Dharma sur l’effet de serre. Prenons soin de notre mère, la Terre. Prenons soin de toutes les espèces, y compris nos enfants et petits-enfants. Il suffit de devenir végétariens, et nous pouvons déjà sauver la planète. Etre végétarien signifie également que nous ne consommons pas de produits laitiers, ni d’oeufs, parce qu’ils sont également des produits de l’élevage. Si nous arrêtons de consommer, ils vont cesser de produire. Seul un éveil collectif peut créer une détermination suffisante pour l’action.

Au mois de décembre 2007, le monastère de Deer Park pourra disposer d’énergie d’origine solaire pour couvrir 100 % de ses besoins en électricité. Dans tous les monastères de la tradition du Village des Pruniers en Europe et en Amérique du Nord, nous pratiquons une journée sans voiture une fois par semaine, et des milliers d’amis pratiquent avec nous. Nous avons commencé à utiliser moins de voitures et à employer des véhicules électriques ou des biocarburants (à partir d’huile végétale). Ces voitures peuvent contribuer à diminuer de moitié la quantité de dioxyde de carbone émise. En achetant une Prius Toyota, qui utilise pour moitié le diesel et l’électricité, nous pouvons empêcher l’émission d’environ 1 tonne de dioxyde de carbone dans l’atmosphère chaque année.


Toutefois, selon l’Université de Chicago, «Etre végétarien est plus efficace dans la lutte contre le réchauffement climatique, un végétarien empêche l’émission d’environ 1,5 tonnes de dioxyde de carbone dans l’atmosphère chaque année, par rapport à un mangeur de viande… Nous pourrions dépenser plus de 15 000 euros pour acheter une Prius et continuer d’émettre deux fois plus de dioxyde de carbone que si nous décidions simplement de ne plus consommer de viande et d’autres produits animaux» (Lutter contre le Réchauffement Climatique en devenant Végétarien).


Est-ce que vous comprenez, ma chère famille spirituelle ? Etre végétarien est suffisant pour sauver le monde. Qui parmi nous connaît le goût délicieux de la cuisine végétarienne ? Si nous sommes trop habitués à manger de la viande, nous ne pouvons pas reconnaître cette vérité.


Ce soir, en commençant la retraite, tout le monde sera informé que nous n’utiliserons ni produits laitiers ni oeufs durant toute la retraite. A dater de ce jour, toutes nos retraites, et bien sûr tous nos centres de pratique en Asie, en Europe et en Amérique du Nord vont suivre cette disposition. Thây fait confiance aux pratiquants laïcs pour comprendre et soutenir de tout leur coeur cette mesure. Notre pratique actuelle consiste à aider tout le monde à prendre conscience du danger du réchauffement climatique, afin de contribuer à sauver la terre et toutes les espèces. Nous savons que sans éveil collectif, la terre et toutes les espèces n’ont aucune chance d’être sauvées. Notre vie quotidienne doit témoigner de notre éveil.

Le 2 octobre 2007, à l’Université de San Diego, Thây a parlé des inquiétudes, des peurs et du désespoir liés à la menace du réchauffement climatique. De plus en plus de gens tombent malades en raison de ces inquiétudes, des peurs et du désespoir. Ils comprennent que si les être humains continuent de vivre dans l’ambition, la haine et l’ignorance, alors la terre et toutes les espèces n’auront aucune chance d’échapper à ce danger. Cette prise de conscience et la peur peuvent submerger et paralyser de nombreuses personnes, et certains d’entre nous vont mourir de maladie mentale avant que les menaces liées au réchauffement climatique ne s’expriment concrètement. Dans l’enseignement, Thây a offert la pratique proposée par le Bouddha : reconnaître et accepter la vérité, et ne pas la fuir.


Le Bouddha nous a enseigné à pratiquer le regard profond dans les graines de la peur en nous, au lieu d’essayer de les recouvrir ou de les fuir. C’est la pratique des cinq remémorations. 1) Je vais vieillir. 2) Je vais tomber malade. 3) Je vais mourir. 4) Un jour, je vais devoir quitter tout ce qui est précieux à mes yeux, et tous les gens que j’aime. 5) Lorsque ce corps se désintègrera, je ne pourrai rien emporter avec moi, sauf mes actions du corps, de la parole et de l’esprit – elles sont le seul héritage que je peux emporter avec moi. Lorsque nous pouvons pratiquer l’acceptation de ces vérités de cette façon, nous aurons la paix, et nous aurons la capacité de vivre sainement et dans la compassion – en cessant de provoquer de la souffrance en nous-même et chez les autres. Lorsqu’une personne qui a le cancer ou le SIDA entend son diagnostic pour la première fois, lorsque le médecin lui dit qu’il lui reste 3 ou 6 mois à vivre, elle réagit souvent par la colère, le déni et le désespoir. Elle ne peut pas l’accepter. Mais ensuite, lorsqu’elle accepte la vérité, elle commence à trouver la paix. Une fois qu’elle est en paix, elle a la possibilité de pratiquer et de vivre «en profondeur » chaque moment de sa vie quotidienne. Ainsi, elle a une chance de vivre plus longtemps, même 15 ans ou plus. Nous avons l’exemple de soeur Dam Nguyen de Hanoi. Elle est venue au Village des Pruniers une année, avec l’intention de vivre quelques mois auprès de Thây et de la Sangha, puis elle pensait retourner à Hanoi pour mourir. Le docteur lui avait dit qu’il lui restait 3 ou 4 mois à vivre. Lorsqu’elle est arrivée au Village des Pruniers, les soeurs lui ont proposé de consulter un médecin, mais elle a refusé. Elle ne sentait pas le besoin de voir un médecin. Elle avait accepté de mourir, et elle a vécu de tout son coeur chaque moment qu’elle a passé avec la Sangha pendant ces trois mois. Lorsque son visa est arrivé à expiration, elle a pris congé de la Sangha. Une soeur plus âgée lui a suggéré de voir un médecin «juste pour voir» comment avait évolué son cancer. Soeur Dam Nguyen a accepté pour faire plaisir à la soeur. Le médecin lui a expliqué que toutes les métastases dans son corps avaient régressé en un seul site, et qu’elle allait très bien. Notre soeur est retournée à Hanoi pleine de joie. Aujourd’hui, cela fait 14 ans qu’elle a quitté le Village des Pruniers pour retourner à Hanoi, et elle est toujours en vie.


Le Bouddha a enseigné que tous les phénomènes sont impermanents ; il y a la naissance, puis il y a la mort. Notre civilisation aussi est comme cela. Dans l’histoire de la terre, de nombreuses civilisations ont pris fin. Si notre civilisation moderne est détruite, cela aussi suit la loi de l’impermanence. Si notre genre humain continue de vivre dans l’ignorance et dans le trou sans fond de l’avidité, comme nous le faisons, la destruction de cette civilisation ne se fera pas attendre. Nous devons accepter cette vérité, tout comme nous acceptons celle de notre propre mort. Une fois que nous l’avons acceptée, nous ne réagirons plus par la colère, le déni ou le désespoir. Nous aurons la paix. Une fois que nous aurons la paix, nous saurons comment vivre de telle sorte que la Terre ait un avenir ; nous apprendrons à vivre ensemble dans un esprit de fraternité et à employer les technologies modernes que nous possédons pour sauver notre chère planète verte. Sinon, nous mourrons d’angoisse et de maladies mentales avant même que notre civilisation arrive à son terme.


Notre mère, la Terre, la planète verte, a souffert des habitudes de consommation violentes et ignorantes de ses enfants. Nous avons détruit notre mère la Terre comme les bactéries et les virus détruisent le corps humain, parce que la Terre est aussi un corps. Bien sûr, il existe des bactéries qui sont bénéfiques pour le corps humain. Des milliards de ces bactéries sont présentes en nous, en particulier dans notre tube digestif (elles constituent la flore intestinale). Elles protègent le corps et l’aident à produire les enzymes dont nous avons besoin. Parallèlement, l’espèce humaine peut aussi être un organisme vivant qui a la capacité de protéger le corps de notre mère, la Terre, si l’espèce humaine se réveille et sait comment vivre de façon responsable, avec compassion et bonté. Le Bouddhisme est apparu afin de nous apprendre à vivre de façon responsable, avec compassion, bonté et amour. Nous devons voir que nous intersommes avec notre mère la Terre, que nous vivons et mourons avec elle.


La Terre a connu plusieurs renaissances. Lorsque le grand déluge provoqué par le réchauffement climatique aura eu lieu, il restera peut-être une petite proportion des êtres humains en vie. La terre aura besoin de plus d’un million d’années pour récupérer et retrouver un beau manteau vert intact, et une autre civilisation humaine commencera. Cette civilisation sera la continuation de notre civilisation. Pour l’espèce humaine, un million d’années est une période très longue, mais pour la terre et le temps géologique, un million d’années, ce n’est rien du tout ; c’est une période très courte. Finalement, la naissance et la mort ne sont que des phénomènes superficiels. La non-naissance et la non-mort sont la vraie nature de toutes les choses. C’est l’enseignement de la Voie du milieu du Bouddhisme.


Cette lettre est déjà longue, et Thây ne souhaite pas faire de commentaires sur cet enseignement. La retraite a commencé, et dans une demi-heure, Thây va rejoindre la Sangha. Thây vous souhaite à tous la paix et une pratique profonde.


Avec amour et confiance,

Thây


Extrait du commentaire de Patrick Olczyk du magazine « Ici et Maintenant » :

« Lors des manifestations des moines en Birmanie, vous aurez remarqué le geste important des moines birmans qui ont renversé leur bol à aumône. Chez nous, ce geste peut sembler dérisoire. Mais Thich Nhat Hanh explique dans un entretien

au TIME magazine : «ce geste fort cela signifie qu’ils renient les dirigeants du régime. Dans la culture bouddhiste, l’offrande de nourriture aux moines symbolise l’action de la bonté. Et si vous n’avez pas la possibilité de manifester votre soutien à la pratique spirituelle, c’est comme si vous étiez laissé dans le royaume des ténèbres».


C’est donc un acte suprême de condamnation. Car cela veut dire que les moines ne donnent aucune chance au régime militaire de faire le bien. La méditation consiste à regarder à l’intérieur de soi pour trouver la compréhension et la compassion. Et lorsque nous commençons à les acquérir avec la pratique, nous nous devons d’agir. Le Bouddha, après avoir connu l’éveil, est sorti pour aider les gens. La méditation ne consiste pas à éviter la société. Il s’agit de regarder profondément pour avoir le type de vision profonde dont nous avons besoin afin d’agir. Thich Nhat Hanh nous dit aussi :


«Croire qu’il s’agit simplement de s’asseoir pour goûter le calme et la paix, c’est faux.»


Derrière le doux sourire et l’attitude calme et pacifique de Thich Nhat Hanh, se trouve une détermination ancrée solidement dans la pratique. Si nous restons dans nos habitudes de consommation destructices et refusons de voir la conséquence, à savoir la catastrophe écologique qui s’en vient, celle-ci finira par s’imposer tôt ou tard à nous avec d’autant plus de force. Alors autant prendre conscience de cette réalité afin d’agir en paix pour vivre autrement, vivre plus simplement afin que l’espèce humaine et bien d’autres espèces animales et végétales aient un avenir sur notre planète Terre.


Pratiquons la vision profonde pour voir ce que nous faisons de nos vies. Si le sous-titre de votre magazine «Ici & Maintenant» est : Zen & Ecologie, ce n’est pas par hasard. Cela découle d’une prise de conscience de l’interdépendance de ces deux réalités.


Auparavant, nous pouvions nous retirer de la société pour méditer. Au XXIème siècle, cela n’est plus possible, nous sommes tous concernés par le réchauffement. Ce thème s’impose à nous, qu’on le veuille ou non. Il devient la priorité sans laquelle rien d’autre ne sera possible.


Au XVIème siècle déjà, à deux pas du Village des Pruniers, Etienne de la Boétie, expliquait dans son fameux texte : «Discours sur la servitude volontaire” que plutôt de vouloir affronter le système (ou ici la société de consommation) «il suffit de ne pas faire ; ne pas éteindre le feu avec de l’eau, cesser de l’alimenter en bois». Et sa grande idée était : «Soyez résolu de ne servir plus, et vous voilà libre»(2). Arrêtons de servir notre ignorance ou notre avidité et nous serons libres d’apprécier le moment présent.


Comme disait Gandhi, nous devons être le changement que nous voulons voir dans ce monde. »


Patrick Olczyk - Ici & Maintenant



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